les restes de la mission de San Ignacio Mini |
Fondée en 1540 par Saint
Ignace de Loyola, la Compagnie de Jésus est un des ordres religieux
qui à le plus marqué le sud de l'Amérique latine, et en
particulier l'Argentine. En effet, à peine le nouveau continent
découvert et colonisé par les couronnes espagnoles et portugaises,
différents ordres (franciscains, dominicains, et autres) y envoient
des prêtres pour convertir les païens qui peuplent ses terres. Dans
l'ensemble leur succès n'est pas retentissant, et les colons eux
voient en ces indiens d'Amérique plus des esclaves à envoyer dans
les mines ou les plantations que des âmes à sauver.
violon fabriqué par les indiens guaranis |
Avec pour objectif
l’évangélisation des peuples originaux, ils ne peuvent tolérer
les raids des chasseurs d'esclaves portugais et dès les années 1600
ils commencent à former au brésil des missions, communautés
regroupant plusieurs milliers d'indiens et dirigées par un ou deux
jésuites. Ce regroupement rend les indiens moins vulnérables au
rapt par les chasseurs esclaves, et c'est ce risque d'esclavage qui
pousse de nombreux chefs indiens à venir rejoindre les missions,
malgré la perte d'autorité que cela représente pour eux.
Les missions ont toutes le
même schéma d'organisation : centrée autour d'une grande place, il
y a d'un côté l'église, le collège, les ateliers de travail
(travail du bois, du fer...) et le cimetière, et des trois autres
côtés de la place s'étendent les maisons pour les familles, les
dortoirs pour les jeunes garçons entre 12 et 17 ans qui sortent de
leur famille pour être instruits, et la maison pour les veuves et
orphelins qui sont pris en charge par la communauté (repris de
l'organisation des communautés guaranies). Le jésuite est
l'autorité suprême de la mission et la vie s'organise autour des
temps de célébration et de prière. 3 jours par semaine, chaque
famille travaille son lopin de terre pour elle même, et 3 jours par
semaine, elle travaille la terre de la communauté. Le dimanche est
le jour de repos, consacré à la prière et la musique. On apprend
aux adolescents à lire, et à pratiquer un métier. Pour éviter la
fornication en dehors du mariage, et aussi parce que les indiens
Guarani ont une espérance de vie de 35 ou 40 ans, on marie les
garçons à 17 ans et les filles à 15 ans.
Mais les chasseurs
d'esclaves ne se laissent pas abattre et attaquent les missions
brésiliennes de façon répétée. Les jésuites décident de bouger
leurs missions vers le sud à plusieurs reprises et finissent par
s'installer dans la région qui aujourd'hui se trouve au croisement
des frontières brésilienne, argentine, et paraguayenne. Pour plus
de sécurité, en plus de leur métier, on apprend au garçons
adolescents à manier les armes dans le but de protéger la mission
en cas d'attaque renouvelée.
Non loin de là, dans la
ville de Cordoba, les jésuites remplissent une autre mission qui
leur tient à cœur : l'éducation. Ils fondent l'Université de
Cordoba en 1610 au départ ouverte pour les élèves de l'ordre, puis
ouverte aux autres à partir de 1622, leur enseignant philosophie et
théologie. L'Université grandit vite, et à cause de tensions
grandissantes en Europe et la Compagnie de Jésus et la couronne
espagnole, elle se voit retirer son financement par le gouvernement
local et doit trouver une autre façon de faire tourner leur
université. Les jésuites créent donc des "estancias",
sorte de grande plantation sur laquelle travaillent à la fois de la
main d’œuvre payée, souvent indienne, ainsi que des esclaves,
souvent d'origine africaine. Il y eut 6 grandes estancias jésuites
autour de Cordoba, et 5 existent encore à ce jour. On y cultivait
maïs, lentilles, haricots, et on y élevait beaucoup de bétail.
Université, missions et
estancias furent gérées par les jésuites jusqu'en 1767, lorsque
l'ordre fut expulsé de tous les territoires espagnols sur ordre du
roi. L'université de Cordoba passa aux mains des franciscains avant
d'être mis sous la direction du clergé séculier, puis nationalisé.
Les estancias furent abandonnées puis rachetées par des
particuliers. Les missions furent réorganisées : un prêtre fut mis
en charge des offices religieux, mais souvent ne parlais pas la
langue locale. Un administrateur du gouvernement fut imposé pour
tous les autres aspects de la vie de la mission, et introduit
l'argent pour la première fois dans la mission, où auparavant on ne
travaillait que pour nourrir sa famille ou la communauté, ou pour
embellir l'église. Les indiens, probablement initiés à l'appât du
gain, n'appréciant pas les dérives des nouveaux administrateurs
coloniaux, et connaissant les métiers que leur avaient enseigné les
jésuites, finirent par abandonner les missions pour aller chercher
du travail à la ville.
Ainsi l'influence jésuite
pris fin vers le 18ème siècle, ayant toutefois fortement marqué
l'histoire de la région.
Merci beaucoup pour cet article très intéressant. Comme à chaque changement de continent, vous nous faites découvrir un nouvel univers !
ReplyDeleteMerci pour le temps que vous prenez à alimenter votre blog !
Bizzz