Wednesday, August 31, 2011

Recette : cuisine du Sichuan

la cuisine du Sichuan, région du sud de la chine, est réputée pour le fait d'allier le piment, qui pique, avec le poivre du Sichuan, qui anesthésie un peu la langue. Le résultat est délicieux, mais papilles sensibles, s'abstenir...

Recette : porc cuit 2 fois

ingrédients : 
- 500g de poitrine de porc
- 2 poivrons rouges
- 2 piments verts
- 3 petits oignons montés
- 200g de haricots noirs cuits
- 2 gousses d'ail 
- 30g de gingembre 
- 1 cuillère à soupe sauce de soja
- 1 cuillère à café de pâte de piment
- 1 cuillère à café de poivre du sichuan

1. mettre la poitrine de porc dans une casserole d'eau froide et la porter à ébullition, puis retirer du feu, égoutter, et couper le porc en fines lamelles.
2. Couper en dés les poivrons rouges, les piments verts (attention à bien en retirer les graines), les petits oignons montés. Hacher finement les gousses d'ail, le gingembre, les haricots noirs.
3. Faire chauffer un demi verre d'huile de tournesol dans un wok : y jeter les lamelles de porc afin de les faire frire 2 minutes, puis les retirer du feu, et retirer l'huile de tournesol.
4. Remettre le porc dans le wok (sans huile) et faire cuire 2 minutes en tournant régulièrement : les lamelles de porc, les poivrons rouges, les piments verts, la pâte de piment, le poivre du Sichuan, les haricots noirs, le gingembre, les oignons, l'ail. Rajouter une pincée de sel, et la sauce de soja.
5. Servir chaud, et préciser que personne n'est obligé de manger les piments : ils sont là pour donner du goût aux autres aliments pendant la cuisson, il est donc normal de les laisser dans le plat.

Recette : Poulet Gumbao

ingrédients 
- 3 escalopes de poulet
- 2 concombres
- 5 petits oignons montés
- 1 poignée de piments séchés
- 200g de cacahuètes non salées
- 1 cuillère à soupe de sauce soja
- 1 cuillère à soupe de vinaigre
- 1 cuillère à café de poivre du sichuan
- 1 poignée de farine
- 2 gousses d'ail 
- 30g de gingembre 

1. Couper le poulet de petits cubes, et le mettre de côté. Couper en cubes les concombres et les petits oignons. Hacher finement l'ail et le gingembre.
2. Faire chauffer un wok avec un peu d'huile, et y cuire les cacahuètes (rincées au préalable) pendant 2 minutes. Puis les retirer du feu et les mettre de côté.
3. Dans le wok, faire chauffer un demi verre d'huile de tournesol, et y jeter les cubes de poulet (en prenant garde de ne pas s'ébouillanter) pendant 2 minutes. Puis retirer le poulet du feu, l’égoutter, et retirer l'huile.
4.Dans un bol, mélanger le vinaigre, la sauce soja, un peu d'eau, la farine, une pincée de sel, une pincée de sucre.
5. Dans le wok chaud mettre à cuire à feu doux le poivre du Sichuan, le piment séché, le gingembre, l'ail, les cacahuètes, le concombre, les petits oignons, et y remettre le poulet. Laisser cuire 10 minutes à feux doux, en mélangeant bien, et rajouter le contenu liquide du bol. Cuire encore 1 minute en mélangeant bien, puis servir.
Attention de ne pas manger les piments séchés : ils sont là pour donner du goût aux aliments pendant la cuisson seulement.

Saturday, August 27, 2011

La chine (suite) en quelques chiffres et photos



534 "oh that's sooo romantic" entendus quand on explique qu'on vient de Paris, 1 type qui portait un casque à moto (et un seul), 102 heures passées dans des trains divers et variés (la majorité sans couchette), 33 heures de bus, 3.5 kg de MSG (exhausteur de goût mauvais pour la santé mais rajouté dans la cuisine par beaucoup de restos chinois), 5 photos prises avec des chinois qui pretextaient qu'ils devaient prouver à leur prof qu'ils avaient pratiqué l'anglais avec des étrangers, 150 militaires sur la place de la grande mosquée de Kashgar, 3.5 kg de raisin mangé à Turpan, 2 pattes de poulet grignottées délicatement (pas fameux), 783 photos de dunes avec montagnes en arrière plan prises depuis le train dans le Xinjiang (vous avez dit photopathie?), 23 viaducs et 496 éoliennes vues par les fenetres du même train, 10372 grues sur des chantiers de construction partout partout partout, 326 roues de prière tibétaines tournées dans des temples divers et variés, 831 moines tibétaiens de 7 à 97 ans en robes rouges, 2 fois virés d'une ville à cause de la venue du Panchen Lama chinois, 19 propositions de curage d'oreilles dans les parcs de Chengdu (toutes refusées poliment, nos oreilles sont propres merci), 457 boutiques de photos de mariage, 82 pandas vue (géants ou roux).


Pour voir nos meilleures photos de ce deuxième passage en Chine : https://picasaweb.google.com/clemetstan/ChinePart2


Les contreforts du Tibet


Le Tibet est une région fascinante et compliquée, souvent assez mal comprise en France, qu'il fait particulièrement rêver. Longtemps dans la sphère d'influence chinoise, il à été définitivement annexé (pardon, libéré) en 1951 par la République Populaire de Chine. Sans rentrer dans des considérations politiques, il suffit de dire qu'il s'agit d'une région stratégique pour la Chine, qu'il lui importe de bien contrôler, pour des raisons de ressources (3 des cinq fleuves majeur du pays prennent leur source au Tibet) ainsi que pour des questions de frontière sensibles avec des voisins turbulents. Le Tibet historique était beaucoup plus grand que ce qui est aujourd'hui la région administrative du Tibet, zone très sévèrement contrôlée par le gouvernement chinois. En effet, si le train reliant Pékin à Llasa en 2 jours est aujourd'hui appelé le train de la colonisation, amenant toujours plus de chinois Han pour s'établir sur le toit du monde, pour les étrangers, il faut non seulement obtenir un permis spécial pour y entrer, mais encore faut-il être en groupe, avec un guide agrée par l'état, qui ne vous lâchera pas d'une semelle (des fois que vous risquiez de parler à des tibétains) pendant la totalité de votre séjour (et accessoirement, cela coûte très cher).


Aujourd'hui si on parle du Tibet à l'étranger, si les français ont manifesté pour la libération du Tibet au moment du passage de la flamme olympique des JO de Pékin en 2008, si les tibétains ne sont pas une minorité ethnique comme toutes les autres en Chine, c'est grâce à un homme qui a su rendre la cause de son peuple célèbre : le Dalai Lama. Le Dalai Lama est l'autorité spirituelle suprême du Bouddhisme tibétain. Son numéro deux, qu'il choisit très jeune, est nommé le Panchen Lama. Il fait savoir qu'en 1995, le Dalai Lama à choisi un enfant tibétain de 6 ans pour être son Panchen Lama, et que celui-ci à aussitôt été arrêté par les autorités chinoises (faisant de lui le plus jeune prisonnier politique au monde) et n'a pas été revu depuis. Le gouvernement chinois a nommé de son côté un autre Panchen Lama, aujourd'hui âgé de 21 ans, peu aimé des tibétains pour des raisons assez évidentes, et n'ayant jamais vécu dans un monastère tibétain.


Nous avons donc décidé de ne pas nous rendre dans la Région Autonome du Tibet, et de plutôt tenter d'apercevoir la culture tibétaine dans ce qui était le Tibet historique et qui appartient maintenant aux régions administratives voisines : Gansu, Qinghai, Sichuan. Nous avons commencé par passer dans la ville de Tongren, près du monastère tibétain de Wutun Si, puis sommes descendus vers Xiahe, la ville du grand monastère de Labrang, qui héberge plus de 900 moines de tous ages. Nous avons malheureusement appris, dès notre arrivée en ville, que nous n'étions pas les bienvenus. C'est à dire qu'une visite du Panchen Lama était prévue au monastère de Labrang, et vu son appréciation par la population locale, les autorités ne voulaient pas que d'éventuels dérapages puissent être vu pas des étrangers. Aucun hôtel n'avait donc le droit de nous héberger, et nous avons du quitter les lieux le jour même. Ceci dit, nous avons quand même eu le temps de visiter le monastère, et de nous balader un peu dans les collines qui surplombent la ville.
le grand monastère de Labrang
vue depuis le village de Jaghana

un des temples de Langmusi
 Nous sommes donc arrivés plus vite que nous le pensions dans le petit village de Langmusi, à la frontière  du Gansu et du Sichuan, à 3300 mètres d'altitude, en plein dans les contreforts du plateau Himalayen. Peuplé essentiellement de tibétains ordinaires, ainsi que des moines qui habitent dans les 2 grands temples du village, Langmusi voit aussi pas mal de cars de touristes chinois qui débarquent pour la journée, et repartent le soir. Il n'y a que les quelques touristes étrangers pour s’intéresser aux belles randonnées à faire tout autour dans cette région magnifique. Grâce à une rencontre fortuite avec Sandrine, une voyageuse française parlant (et chantant) chinois, et l'argentin Sebastian, nous avons pu profiter des plusieurs balades dans les montagnes et villages autour de Langmusi : le village de Jaghana, la fête foraine de Maqu.

courses de chevaux à Maqu
Le long des routes on voit des petits cochons noirs qui se cherchent à manger sur les talus, des femmes qui portent des grandes hottes en osier remplies de paille ou de crottes sèches pour servir de combustible, des enfants qui se baignent dans un ruisseau, ou encore des yaks qui broutent et traversent la route quand bon leur semble (peu import si des motos, voitures ou camions passent).

Les tibétains ont des très beaux visages, particulièrement les femmes (de tous ages). La ressemblance avec les indiens d’Amérique du sud, qui vivent dans les Andes, est frappante ! Nul doute que ce sont les ancêtres de ce peuple qui ont passé le détroit de Béring et ont été les premiers à peupler le nouveau monde.

Pour voir un album de portraits tibétains : https://picasaweb.google.com/clemetstan/VisagesTibetains


Puis après quelques jours d'air pur dans les montagnes, nous avons repris le chemin de la ville : Chengdu, la capitale du Sichuan. Il s'agit d'un très grande ville, au centre ville ultra moderne, plein de gratte-ciels, de boutiques de luxe qui climatisent la rue, des dizaines (centaines?) de magasins de photos de mariage. Mais il y a aussi de nombreux parcs où il fait bon se reposer dans des salons de thé à l'ombre, tandis que des colporteurs proposent des massages (violents, mais efficaces selon Stan) ou un nettoyage d'oreille (là, on n'a pas été tenté, curieusement). On y trouve également un grand centre pour la protection et la reproduction des pandas (pandas géants, et petits pandas roux). Enfin, notre temps en Chine touchant à sa fin (notre visa nous permet de rester maximum 30 jours à la suite) nous avons quitté la Chine pour l'Inde, où nous allons passer les 2 prochains mois.

Friday, August 19, 2011

le Xinjiang, le far-west de la Chine

Suite à notre escapade en Mongolie, nous sommes revenus en Chine par le train et le bus, via la ville frontière d'Erlian, la ville de Mongolie interieure de Hohhot, et enfin Xi'an. Xi'an est une des anciennes capitales de la Chine impériale. C'est ici que l'empreur Qin Shi Huang, ayant unifié la Chine de son époque (221 avant JC) s'est fait enterré avec des milliers de soldats en terre cuite : c'est la fameuse armée de terracotta, découverte par hasard par des paysans creusant un puit dans les années 1970.

Nous avons passé quelques jours dans le coin pour ensuite prendre un train vers le Xinjiang, avec comme première destination la ville de Turpan (prononcé Touloufane par les chinois) le point le plus chaud de Chine en été. Le trajet a duré 33h, en place assise non-inclinable, mais on ne s'en plaint pas trop car dans ces wagons, il y a un grand nombre de personnes qui sont en "places debout" et passent le trajet dans les allées ou bien près des toilettes. Après un jour et demi nous sommes enfin arrivés à Turpan.
La province chinoise du Xinjiang est immense et pour la plupart désertique. Elle touche la Mongolie au nord, le Kazakstan, le Kirghizstan, l'Afghanistan, le Pakistan et l'Inde à l'ouest, et la province du Tibet au sud. Les caravanes de la route de la soie arrivaient en Chine par là, à dos de chameau (animal qui pouvait porter leur marchandises sans pour autant faire une grande consommation d'eau) avant de traverser le grand désert de Taklamani. Heureusement, si la région est désertique, il y a un bon nombre de villes-oasis, alimentées en eau par des sources et rivières souterraines.

De nombreuses minorités ethniques vivent dans le Xinjiang, mais la plus connue, comptant pour plus de 50% de la population de la province (ils sont 9M en Chine), est l'ethnie Ouïgour. Les Ouïgours sont des cousins proches des peuples d'asie centrale. En anglais on les appelle les peuples "Turkic", et physiquement, les Ouïgours ressemblent plus à des turcs qu'aux chinois Han. Ils ont parfois les cheveux chatains, des yeux non-bridés, la peau très mate, et des yeux clairs. Ce peuple est musulman, et utilise une écriture qui ressemble beaucoup à l'arabe. Les hommes aiment porter soit une calotte blanche, soit un petit chapeau carré brodé, et les femmes ont pour la plupart un foulard dans les cheveux (certaines sont completement voilées). Si le mot "Ouïgour"ne vous est peut-être pas inconnu, c'est qu'en 2009 il y a eu des émeutes dans la région, opposant ce peuple à la population Han locale, et résultant de nombreux morts. Il y a pas mal d'animosité entre ces deux peuples (même si de nombreuses autres minorités ethniques sont présentes dans la région) car les uns ont l'impression de se faire envahir et que la modernité et le progrès technique apporté par les autres détruit leur culture, à laquelle ils tiennent beaucoup.

Photos : Quelques visages du Xinjiang

militaires chinois sur la place principale de Kashgar
après les évènements de début août
Durant notre séjour, il y a eu de nouveaux conflits : dans la ville de Khotan, des Ouïgours ont attaqué une caserne de policiers, en ont tué un nombre indeterminé, avant d'être à leur tour tous liquidés par l'armée. Deux semaines plus tard, à Kashgar, deux hommes Ouïgours ont pris le contrôle d'un camion, l'ont conduit dans une foule de hans, faisant de nombreux morts, puis ont continué sur leur lancée en descendant du véhicule et poignardant d'autres personnes dans la rue. Le lendemain d'autres ouïghours ont poignardé des hans dans un restaurant et ont incendié le bâtiment. Le gouvernement, qui contrôle de très près les informations au sujet de ces incidents, a laissé passer l'information qu'il y avait peut-être eu des bombes (qu'il n'y a pas eu) et décrété que c'était l'oeuvre de terroristes formés au Pakistan (mais de quelle formation a-t-on besoin pour conduire une camion dans une foule ou poignarder des gens?). Les chinois avec qui nous étions à ce moment là nous ont aussi expliqué que les sms parlant de ces incidents étaient bloqués. Toujours est-il qu'il y a pas mal de tensions, et que nous avons pu constater la présence de centaines de militaires, dans les gares, sur les places, des checkpoints le long des routes... Mais il n'y a aucun moyen de savoir quelle proportion des ouïghours soutient ces attentats ou ces revendications.
oasis, puis au delà le désert de taklamani, et au loin les montagnes
enneigées du Pakistan 

Nous avons rencontré une prof d'anglais fort sympathique dans le train, qui était tellement ravie d'avoir l'occasion de parler avec des anglophones sympas, qu'elle nous a invité à venir visiter sa ville de Yecheng, un peu plus loin sur la ligne de train que Kashgar, où nous avions l'intention de descendre. Nous avons donc profité de cette occasion, et avons poursuivi notre voyage jusqu'à Yecheng, où nous avons rencontré les autres professeurs d'Anglais du même collège où enseigne Han Mei Chin : elle même est de la minorité Hui, et ses collegues sont l'un Ouïgour et l'autre Han, et tous les trois très gentils et contents d'avoir l'occasion de nous parler et de nous montrer leur ville. Notre prof d'anglais nous a également invité dans sa famille pour un repas gargantuesque et délicieux (où nous n'avons malheureusement pas pu apprendre de nouvelle recette, car en tant qu'invités, nous étions confinés au salon), occasion pour nous de goûter les fameuses pattes de poulet (pas fameux, vraiment).
à peine le soleil couché, les Ouïgours rompent le jeûne du ramadan dans la rue


marché de Khotan
Après notre départ de Yecheng nous avons continué un peu vers le sud jusqu'à Khotan, puis sommes revenus sur nos pas jusqu'à la ville de Kashgar. Grande ville la plus à l'ouest de la Chine, à quelques heures de la frontière Pakistanaise, on a vraiment l'impression d'être dans un autre pays. Les devantures de magasin sont écrites en arabe en premier, et ensuite en carateres chinois, la plupart des femmes ont des foulards dans les cheveux, et surtout, nous y arrivons en plein ramadan, et il est impossible de trouver à manger pendant la journée. Nous trouvons moyen d'acheter un grosse pastèque et des pains secs et nous réfugions dans notre auberge à l'abris de la chaleur et des yeux pour déjeuner. Nous y avons visité la grande mosquée, puis un mausolée couvert de tuiles en céramique de couleurs différentes.
mausolée de Kashgar






femme dans son étalage de tissu
Nous avons visité le grand marché de la ville, où l'on peut trouver tant des tissus et des habits, que de la quinquaillerie, des souvenirs pour touristes, ou de la vaisselle. Nous nous sommes baladés dans la vieille ville, dans les petites ruelles pentues bordées de maisons en boue séchée, et nous avons pu voir le marché du dimanche, où se réunissent  de nombreux paysans d'asie centrale pour acheter et vendre leur bétail : vaches et taureaux, chèvres, moutons, ânes, tout cela dans un joyeux tintamarre.
marché au bétail de kashgar


Thursday, August 11, 2011

Quelques réflexions sur la politique de l'enfant unique en Chine


Mise en place en 1979, soit 3 ans après la mort du Grand Timonier Mao Zedong, la politique de l'enfant unique avait pour but de refréner la gigantesque croissance de la population chinoise, face à des ressources qui ne suivaient pas. Les familles ayant un deuxième enfant se voyaient appliquer des amendes exorbitantes, devaient payer eux-même pour la scolarisation de l'enfant, pouvaient se voir refuser des soins médicaux ou l’accès au logement dans les villes. Tout était fait pour inciter les familles à se limiter elles-mêmes.
Certains problèmes liés à cette politique ont émergé assez vite. Par exemple, certaines familles qui avaient un deuxième ou troisième enfant, notamment à la campagne, où des bras supplémentaires aux champs étaient les bienvenus, ne déclaraient que le premier, ce qui fait qu'il y a aujourd'hui un nombre inconnu mais non-négligeable de chinois qui n'ont pas d'identité officielle. Ils ne vont donc pas à l'école, ne peuvent se faire soigner dans des hôpitaux, n'ont pas accès au logement dans les villes, ne peuvent se marier officiellement, et leurs enfants auront le même sort...

Un deuxième problème, dont on commence seulement a voir les répercussions aujourd'hui, est la préférence des parents chinois pour les petits garçons. De nombreux infanticides ou abandons des petites filles à la naissance ont eu lieu sur près de 30 ans, et aujourd'hui le gouvernement chinois interdit même aux gynécologues de divulguer le sexe d'un enfant lors d'une échographie, sous peine d'emprisonnement. Il n’empêche qu'aujourd'hui, il existe un réel déséquilibre dans la proportions d'hommes par rapport aux femmes, et particulièrement dans les campagnes. Dans certaines régions frontalières, on dit même que certains chinois n'hésitent pas à aller s'acheter une épouse de l'autre côté de la frontière (au Vietnam, par exemple), faisant de la malheureuse victime une esclave ménagère et sexuelle, parfois pour plusieurs hommes du même village. Cela ne fait pas beaucoup avancer la cause de la femme.

Pour s'assurer que les familles n'ont bien qu'un enfant, les autorités ont une méthode redoutable : toute femme ayant déjà un enfant et se trouvant de nouveau enceinte est avortée de force, qu'elle en soit à son premier ou dernier mois de grossesse. On nous a raconté l'existence de réseaux pro-vie qui cachent les femmes enceintes qui ne veulent pas avorter, le temps de leur accouchement, et après se débrouillent pour remettre l'enfant illicite à un orphelinat. Mais très clairement, cela ne concerne pas la majorité, qui se laisse faire. Par ailleurs, même si une femme n'a pas déjà un enfant, on nous a raconté que lors de la première visite au gynécologue, si celui-ci confirme la grossesse, sa première question est "voulez-vous le garder?". En effet, comme toute femme n'a qu'une opportunité d'enfanter, si jamais ça ne tombe pas au moment le plus opportun (économiquement, professionnellement, relationnellement...) certaines préfèrent avorter pour remettre cela à un moment plus favorable.

On se doute donc, si certaines femmes sont prêtes à avorter si ce n'est pas le moment opportun de leur vie pour avoir leur unique enfant, que si l'on détecte un défaut physique à l'enfant pendant la grossesse, il à peu de chance d'être mené à terme. Et même les enfants qui sont menés à terme et naissent avec un défaut important (bec de lièvre, défaut respiratoire, vessie à l’extérieur du corps...) sont abandonnés dans des orphelinats qui n'ont pas les ressources pour les faire opérer, où ils n'auront aucune chance d'être adoptés. (Heureusement il existe des organisations comme la Hope Foster Home de Robin et Joyce Hill, qui se charge de faire opérer ces enfants à leurs frais, et de s'en occuper jusqu'à ce qu'ils trouvent une "forever family" qui les adoptent.)
32 ans plus tard, nous sommes à la deuxième génération de l'enfant unique. Cela veut dire qu'aujourd'hui la plupart des enfants de moins de 10 ans n'ont pas de frère ni de sœur, et qu'il n'ont pas non plus de cousins, puisque leurs parents sont eux aussi enfant uniques. Cela veut dire que chaque enfant à deux parents et quatre grand-parents qui veillent exclusivement sur lui. Cette attention constante de 6 adultes sur un enfant grandissant peut être parfois un peu lourde. En effet, il faut satisfaire les attentes de tout ce monde, en obtenant les meilleurs résultats scolaires, le meilleur travail... Par ailleurs, les enfants sont relativement peu débrouillards, vu qu'ils n'ont pas à faire grand chose eux-mêmes. Ils n'ont pas non plus vraiment appris à partager leurs jouets, ni à s'occuper d'un plus petit qu'eux, et n'ont parfois pas beaucoup d'esprit d'initiative. Cela se sent dans les comportements : par exemple, on voit beaucoup de touristes chinois en groupes, suivre des tours organisés par dizaines, mais ils ne sont que très peu à savoir organiser leurs vacances tous seuls.

Il se trouve tout de même un effet positif inattendu de cette politique : le fameux "plafond de verre", qui empêche les femmes de monter au delà d'un certain niveau hiérarchique en entreprise, semble être moins présent en Chine qu'ailleurs. En effet, si les femmes ne peuvent avoir qu'un seul enfant, et qu'en plus cet enfant aura quatre grand-parents dévoués pour le surveiller à chaque instant, alors les entreprises peuvent considérer qu'il y a moins de "risque" de voir leurs employées partir en congé maternité ou parental. Notre amie Ségolène qui connaît tout Pékin nous avoue ne pas connaître un Directeur Financier à Pékin qui ne soit en fait une Directrice Financière. (Seule sphère où les femmes se trouvent face à un plafond de verre infranchissable : la politique)

Enfin, dernier effet à retardement de cette politique de l'enfant unique : le vieillissement de la population. Les autorités chinoises s'en sont bien rendues compte lors du dernier recensement de la population il y a quelques mois, la proportion de personnes âgées dans la population est grandissante, et le fait d'être seul à subvenir aux besoins de 4 grand parents et 2 parents est très lourd pour les jeunes chinois. Le gouvernement à donc décidé d'assouplir un peu cette politique : il y a dorénavant plusieurs cas de figures où les chinois ont le droit d'avoir plusieurs enfants. Les personnes d'une des ethnies minoritaires (les tibétains, les ouïgours, les bai, les mongols, les hui... il y en a une soixantaine, qui représentent 8% de la population chinoise) ont le droit d'avoir jusqu'à 3 enfants. Les personnes de l’ethnie han majoritaire vivant à la campagne ayant eu une fille ont le droit d'avoir un deuxième enfant (dans l'espoir d'avoir un garçon). Enfin, les personnes qui sont enfant unique et dont les parents sont également tous deux enfants uniques ont le droit d'avoir deux enfants. Toutefois, il semblerait que ces exceptions ne soient pas encore très bien connues de la population chinoise.

On pourra critiquer la politique de l'enfant unique autant qu'on voudra, elle a quand même bien servi la Chine (et le monde!). En effet, avec une population actuelle de 1.3 milliard, la Chine compte presque le quart de la population mondiale ! Sans la mise en place de cette politique il y a 30 ans, le pays en compterait peut être le double, et n'aurait jamais eu les ressources pour nourrir, ni loger cette population ! Sans cette politique, la Chine ne serait sans doute pas le géant économique (2ème économie mondiale après les USA) qu'ils sont aujourd'hui.

Sunday, August 7, 2011

Religions et réflexions en quittant la mongolie




Nous sommes restés peu de temps en Mongolie, mais nous avons eu la chance d'y rencontrer des gens qui ont pû nous donner des explications sur le thème des religions et des communautés chrétiennes.

Avant l'ère communiste (1924-1991), la plupart des religions étaient représentées en Mongolie. Le chamanisme y est la pratique religieuse la plus ancienne : comme chez d'autres peuples cousins d'Asie et d'Amérique, le chaman assurait la médiation entre une communauté et le monde des esprits. Au 13ème siècle, le bouddhisme est devenu religion d'état suite à l'établissement de forts liens culturels, politiques et spirituels avec le Tibet (Les deux peuples nomades en terre hostile ont beaucoup de points communs et se sont ensuite au cours de l'histoire soutenus à plusieurs reprises face à la Chine). Dans la capitale érigée par Genghis Khan (détruite en 1368), la liberté religieuse était assurée, et la plupart des religions étaient représentées (Bouddhisme, Christianisme). Les chrétiens (comme la femme de Genghis Khan) étaient présents en Mongolie depuis le 7ème siècle : c'étaient des nestoriens - du nom d'un patriarche de Constantinople du 5ème siècle qui pensait que le Christ avait deux natures séparées, l'une humaine et l'autre divine-. Ils ont progressivement disparu.

Mais c'est surtout le communisme qui a maltraité toutes les religions sans exception. Les religieux ont quitté le pays et les nombreux monastères bouddhistes se sont vidés (ou ont été vidés). 10000 moines bouddhistes ont été massacrés dans les années 1920.

Depuis 1991 les différentes religions ont pû reprendre pied en Mongolie et les monastères bouddhistes se remplissent de nouveau. Le chamanisme des campagnes est aussi encore présent aujourd'hui et en fait très souvent mélangé au bouddhisme. En voyageant on croise parfois des stupas - construction blanche symbolique du culte bouddhiste - et plus régulièrement des "ovoos", des tas de pierres avec des drapeaux colorés, qui signalent un lieu reconnu comme sacré, souvent un lieu un peu élevé. On nous explique que les gens ajoutent une pierre à l'édifice et tournent trois fois dans le sens des aiguilles d'une montre en disant "je te donne une pierre, rend moi riche". (mais peut-être nous a-t-on un peu simplifié la prière). Dans l'une des familles dans laquelle nous passons, la mère est chamane. Il y a au fond de la ger - tente mongole - un autel avec des objets bouddhistes et chamaniques, et des offrandes variées de nourriture et boisson. A chaque repas, cette femme sort de la ger pour jeter du lait vers le ciel en faisant quelques incantations. Cette femme est très "religieuse", mais c'est malheureusement la personne la moins ouverte et la moins accueillante que nous avons rencontré. Sans vouloir généraliser il nous semble dommage que la pratique religieuse enferme au lieu d'ouvrir...

La communauté catholique de Mongolie est quant à elle l'une des plus petites au monde, avec environ 600 fidèles et une poignée d'églises. Il y a cependant une grande et belle cathédrale catholique à Ulaan Baatar, construite récemment en forme de "ger" (yourte) ce qui lui donne un air d'église byzantine. Nous avons la chance d'apercevoir une vingtaine de religieux catholiques de Mongolie (sur une soixantaine) rassemblés pour une réunion annuelle. Ils viennent d'Afrique, d'Asie et d'Europe et s'attachent à lancer et soutenir de nombreux projets d'intérêt commun (maison d'accueil pour les gamins de la rue, pour des handicapés, centres de formation, maternelles, écoles...), avec humilité et dévouement. Il n'y a pas encore de prêtre mongol, mais il y a un mongol actuellement séminariste en Corée du Sud.

Les protestants sont quant à eux désormais plusieurs dizaines de milliers dans le pays. On nous explique qu'ils ont eu un succès plus marqué car ils ont notamment investi le pays avec davantage de moyens. Les baptêmes sont aussi beaucoup plus nombreux car ils peuvent être quasiment immédiats chez certains protestants (chez les catholiques on ne peut être baptisés qu'après 2 ans de catéchuménat). Les protestants construisent aujourd'hui de nombreux temples à travers le pays.

Surtout, on nous parle à plusieurs reprises des riches mormons qui viennent deux par deux en costume faire du "yourte à yourte", jeter à bas les autels bouddhistes et tenter de convertir les gens. Si leur agressivité leur donne des résultats elle a aussi pour effet de braquer une bonne partie de la population contre les chrétiens en général. (Les mormons se considèrent chrétiens, mais ne le sont pas aux yeux des autres chrétiens car ils suivent surtout les textes de leur fondateur, et font preuve d'un sectarisme et de méthodes critiquables). Comme bien souvent ceux qui font le plus de bruit sont assimilés à toute une catégorie de personnes, et les mouvements plus représentatifs, plus constructifs mais plus discrets, en pâtissent.

Bien que les religions soient à nouveau autorisées depuis 1992, il reste de nombreuses contraintes importantes. La religion est en quelque sorte "interdite au moins 16 ans" : Il est interdit de parler de religion à un enfant de moins de 16 ans. Ainsi le catéchisme est interdit, ainsi que l'assistance à la messe d'un enfant sans ses parents. Des religieux catholiques ont fait les frais de ces règlementations (bien que la Mongolie soit devenue une démocratie l'ancienne police est plus ou moins restée en place...). Même porter un col romain en public pour un prêtre est mal vu par les autorités. En revanche il semblerait que des mouvements ayant beaucoup de sous soient moins inquiétés (la corruption est un problème important dans le pays et l'ancien président est assez probablement richissime)...

Dans tous les cas la Mongolie est aujourd'hui dans une situation particulièrement tangente. Une bonne moitié de sa population vit quasiment comme il y a un millénaire :  les mongols des campagnes habitent dans des gers qu'ils déplacent à chaque saison, avec tout leur bien et leur bétail. Bien sûr aujourd'hui quelques motos complètent les chevaux et des panneaux solaires permettent de recharger un téléphone portable ou de recevoir la télévision, mais l'essentiel reste le même. L'autre moitié de la population se presse dans les ville, surtout à Ulaan Baatar, ville "à la soviétique" embouteillée et polluée. Les arrivées à la ville trop brutales et décevantes, l'alcool, l'appât du gain à travers des larcins ont parfois des effets dévastateurs. Nombreux sont ceux qui survivent en fait dans un bidonville de gers à la périphérie de la ville. D'un autre côté la Mongolie devient la cible de nombreux investisseurs : les immenses richesses minières du pays attirent la convoitise de la Chine, de la Russie, mais aussi de l'Australie, du Canada... Des investisseurs plus ou moins recommandables arrivent en masse dans ce nouvel eldorado avec l'espoir d'un gain facile, sans avoir pour intention de prendre en compte les conséquences environnementales et sociales de leurs actions. Tout le monde attend le "boom" (la bulle ?) et on nous cite des français qui sont clairement là pour l'argent et disent : "En France on peut gagner 15 000 € par mois. C'est gentil. Ici je compte faire dix fois plus".

L'argent roi menace de déstabiliser beaucoup de choses, et dans ce cadre les réflexions et les valeurs que peuvent apporter les religions constructives pourraient être très utiles à la société et au gouvernement (pour l'instant apparemment plutôt méfiant vis à vis des requins de tout bords, contrairement à ses prédécesseur ultra-corrompus). Mais après la table rase du communisme et peu de temps pour planter des racines jusqu'aux confins de la Mongolie, leur impact sera probablement assez local...

Saturday, August 6, 2011

La Mongolie en quelques chiffres et photos


6 heures passée à dos de chameau (aïe), 2 tentatives d'airag (lait de jument fermenté), 57 tasses de thé salé au lait, 3 orages diluviens, un trajet en minibus over-bondé (malawi style) avec 19 personnes dont un ado qui parlait 10 mots d'anglais, 4 nuits passées sous la yourte et 4 sous la tente, 30 lutteurs (et leurs accompagnateurs aux chapeaux pointus) qui combattent en même temps à Naadam, 10 heures passées à cheval (et seulement une chute peu glorieuse au moment de descendre, quand le pied de clem est resté coincé dans l'étrier), en tout 63 km parcourrus à dos d'animal, 7 heures passées à l'ambassade indienne d'Ulaan Baatar a essayer d'obtenir notre visa pour l'Inde (et 2 visas pour l'inde obtenus !), 4 bieres bues pour fêter ça, un cocktail du 14 juillet où on s'est tappé l'incruste, 12 bracelets distribués, 3 kilos de fromage sec ingurgités, 4 verres de vodka "chinggis khan" imposés par un mongol intimidant, une flèche dans le mille (pour stan), 10 paquets d'épices emportés (on nous avait prévenu que la nourriture serait mauvaise) et non-utilisés.

les photos : https://picasaweb.google.com/clemetstan/Mongolie


La Chine (part 1) en quelques chiffres et photos

4 bons copains retrouvés sur place (allez les autres: motivez vous !), 13 jours squattés chez ségolène,  9 trajets en train (dont 2 trains de nuit en place assise), 152 repas chinois délicieux (dont un préparé par clem et ségo), 7 rendez-vous à aperitivo (ze place to be a Pékin), un rhume attrapé à cause de la clime du metro de shanghai, 268 visionages (dans le metro ou le bus) du clip de Jackie chan à l'occasion des 90 ans du parti communiste, 82 sursauts de Clem lorsque des chinois bedonnants se raclent la gorge pour cracher (toujours juste quand ils passent juste derrière elle), 4 passages au “bookworm” de pékin (coup de coeur de stan), 7 nuits squattées chez Jean-Yves et Fenghua (et au moins 20 heures de discussions profondes jusqu'au bout de la nuit), 37 km marchés avec Edouard et JB à Suzhou et Hangzhou, 121973 bouddhas sculptés dans les grottes de Datong, 42 chorégraphies de teambuilding vues devant des coiffeurs/restos/centre commerciaux/boutiques, 5 litres de thés goûtés au marché du thé de Shanghai, 31 “au fait, j'vous ai pas dit mais vendredi c'est les 90 ans du parti” (en passant devant une des affiches qui tappissent toutes les villes à l'occasion), 22 chiens ridicules rasés, 7 heures passées à l'ambassade de mongolie sur 3 jours (pour avoir notre visa de justesse), 6 tunnels souterrains à prendre pour accéder à la place Tien an men (alors qu'elle est juste de l'autre côté de la rue!), 371 caméras de surveillance sur la place Tien an men, 821 personnes rencontrées à Pékin grâce à Ségo (qui connaît toute la ville), 45 bambins adorables attendant d'être opérés et adoptés au Hope Foster Home (ils en ont accueilli plus de 1000 depuis 10 ans), 29 jours passés (visa oblige) mais ce n'est qu'un au revoir... (to be continued après la mongolie)

https://picasaweb.google.com/clemetstan/ChinePart1