Sunday, April 24, 2011

No Comment Afrique

Un diaporama sans commentaires derrière ce lien

Les femmes en Afrique

Après 2 mois et demi dans 3 pays africains, nous avons pu nous rendre compte que la place de la femme n'est pas la même selon les endroits, et que cette distinction se fait moins selon les pays que selon les ethnies. En effet, si la plupart des communautés que nous avons rencontrées sont patriarcales, c'est à dire que le pouvoir est détenu par les hommes, certaines ethnies sont matrilinéales, comme les Chewa du Malawi. C'est à dire que lorsqu'un garçon se marie avec une fille, c'est lui qui quitte sa famille pour aller sur la terre de sa belle-famille. Si il a des enfants et devient veuf, soit il reste dans sa belle-famille et ne peut se remarier, soit il retourne dans sa famille, ou va dans la famille de sa nouvelle femme et ses enfants peuvent choisir de le suivre ou de rester dans "leur famille" (celle de leur mère). Dans tous les cas, si un père frappe ses enfants, le frère de la mère peut intervenir en estimant qu'il va trop loin. Ce système à l'inconvénient de faciliter la fuite aux hommes qui voudraient abandonner femme et enfants, ils n'ont qu'à partir et rentrer chez eux. Dans tous les cas, le pouvoir est généralement quand même détenu par les hommes, même si cela évolue un peu, un des chefs régionaux des Chewas et Ngonis du sud du Malawi est une femme, chose impensable il y a quelques années.

Dans toutes les communautés que nous avons rencontrées, la femme est responsable du rôle traditionnel de gardienne du foyer, devant s'occuper de la préparation du repas, de l'achat des provisions, de l'éducation des enfants en bas âge. Cela s'ajoute au travail aux champs, et, plus rarement, à un emploi payé. En effet, la femme effectuant souvent un travail essentiel pour la survie de la famille, elle est rarement rémunérée en espèces sonnantes et trébuchantes, ce qui la rend très vulnérable en cas de maladie ou d'abandon ou de décès de son mari/compagnon. De plus, les familles sont souvent très nombreuses : le nombre moyen d'enfants par femme au Malawi est de 5 !  Il peut également arriver que si la femme gagne sa vie, elle reverse quand même son salaire à son mari, chef de foyer, qui en dispose à son gré (pas toujours très sagement).
Une conséquence indirecte de cette répartition des revenus dans le couple est que, si une femme soupçonne son compagnon d'infidélité, et qu'il refuse d'effectuer un test de dépistage du VIH,  la femme, n'ayant pas d'économies car elle ne touche pas de salaire, se retrouve face à un choix cornélien : continuer à vivre avec un partenaire potentiellement séropositif qui risque de la contaminer à son tour, ou bien se retrouver à la rue et risquer d'avoir à se prostituer pour survivre (et donc avoir des fortes chances d'être contaminée par le VIH très vite).Dans l'ensemble, les femmes en Afrique sont plus vulnérables face au VIH que les hommes car c'est rarement elles qui décident quand et comment auront lieux les rapports sexuels.

Cependant, dans le monde politique, la situation de la femme est en pleine évolution. En Afrique du Sud par exemple, la mise en place d'un système de quotas dans le parti principal, l'ANC, change la donne: dans les gouvernements locaux, les femmes sont passées de 19% de représentation en 1996 à 40% en 2006, et à l'Assemblée Nationale, elles étaient 27% en 1994 et sont aujourd'hui plus de 43%. Cela à des effets notables, notamment sur la législation concernant les violences faites aux femmes. Cependant on est encore loin du compte dans beaucoup d'autres pays, et les femmes restent beaucoup plus vulnérables à toutes les formes de violences en général que les hommes.

Enfin, si la plus part des africains dans les pays que nous avons rencontré sont chrétiens et donc monogames, dans certaines communautés, comme les Xhosas et les Zulus d'Afrique du Sud, les Yaos du Malawi, et chez les 30% de Tanzaniens qui sont musulmans, la polygamie est autorisée. De la même manière, le président actuel de l'Afrique du Sud, Jacob Zuma, a 4 femmes (dont une jeunette qu'il a épousé il y a moins de 2 ans). C'est lui aussi qui après avoir couché avec une prostituée sans préservatif a affirmé qu'ayant pris une bonne douche il était protégé. Un tel exemple à ce niveau-là fait des ravages...

Quelques jours en Tanzanie

Nous n'avions pas prévu de passer beaucoup de temps en Tanzanie, nous ne devions y passer que pour prendre notre vol pour Israel. Cependant, les impératifs des visas ont fait que nous avions 2 semaines à y passer, et nous en avons profité pour rendre visite à Céline, volontaire Fidesco dans un hôpital dela ville de Moshi, au pied du Kilimanjaro. Nous avons donc passé quelques jours à l'hopital St Joseph, tenu par les soeurs de Notre Dame du Kilimanjaro, à suivre Céline dans son quotidien d'infirmière volontaire, afin de produire du contenu que Fidesco pourra utiliser dans ses communications. Un grand merci à Céline et aux soeurs qui se sont remarquablement bien prêtées à l'exercice alors que nous mêmes y étions novices.



Ayant quelques jours et un vieux rêve à accomplir (Clem était déçue de n'avoir pas vu de lions en Afrique du Sud) nous avons fait une folie : nous nous sommes offert un safari dans le mythique cratère du Ngorogoro, et dans le Serengeti. Une folie relativement raisonnable car c'est la basse saison actuellement, et nous avons pu nous greffer sur un groupe ce qui permet de réduire certains coûts. C'était l'apothéose de tous les safaris que nous avions pu faire en Afrique du Sud:


nous avons vu une dizaine de lions lézardant au soleil à 2 mètres de la voiture à deux reprises, des zèbres, des hyènes, des chacals, des hordes de gnous traversant le Serengeti (ce qui veut dire "plaines sans fin" en Masaï) pour leurs migrations saisonnière, un léopard se prélassant dans un arbre, un groupe d'éléphants avec deux tout petits qui allaitaient encore, de nombreuses girafes, des hippopotames aux flatulences nauséabondes, des babouins joueurs, des oiseaux extraordinaires, des vautours en train de déchiqueter une carcasse de zèbre, des buffles, des rhinocéros, des gazelles gracieuses et des petites antilopes pas plus grandes que des chevreaux à taille adulte.  (Nous avons donc bien vu les "Big 5", qui sont les 5 animaux les plus dangereux à chasser, que tout touriste en afrique cherche à apercevoir, il s'agit du lion, du léopard, du buffle, de l'éléphant, et du rhinocéros)

Nous avons essuyé une mésaventure mineure qui devait arriver tôt ou tard: Clem s'est fait piquer son portefeuille à la descente d'un bus. Cela nous a joué des tours car après vérification, Ethiopian Airlines qui devait nous emmener en Israel nous à confirmé que nous devions présenter la carte bleue qui avait servi pour effectuer la reservation, au moment de l'enregistrement. Cela ne nous a pas empeché de profiter de 3 jours sur l'île semi-autonome de Zanzibar, au large de la Tanzanie. Nous avons visité rapidement la vieille ville de Stone Town, puis nous sommes allés nous réfugier dans un bungalow sur la plage dans le petit village de pecheurs de Bwejuu, sur la côte est de l'île. Là l'eau est à 30° (voire plus), transparente, le sable blanc et fin, les coquillages les plus extraordinaires jonchent la plage, et les poissons nagent le long de la barrière de corail qui protège la plage des vagues. Un petit coin de paradis, qui nous a permis de nous remettre de nos émotions. C'est donc tout reposés et un brin nostalgiques que nous avons quitté l'Afrique le 15 avril en direction d'Israel.

update : voici enfin nos photos préférées de la tanzanie : https://picasaweb.google.com/clemetstan/Tanzanie

Quelques réflexions en quittant le Malawi

Accueil
En quittant le Malawi nous étions tristes. Le "warm heart" of Africa nous aura beaucoup touchés. Nous avons été si bien reçus, au-delà de ce que nous pouvions imaginer, par les sourires et la gentillesse de la plupart de ses habitants, par ses enfants qui nous saluaient en criant dès qu'ils nous voyaient, par ces enfants qui sont venus nous tenir la main juste pour marcher 10 minutes avec nous...
Le Malawi a quelque chose de spécial : alors que nous avons dû payer des visas (et supporter des douaniers plus ou moins amènes) pour traverser 12h le Mozambique et le Zimbabwe en venant en car de Johannesburg, le Malawi nous a acueillis gratuitement et avec un grand sourire. De nombreux pays d'Afrique ont des problèmes liés à la coexistence de plusieurs ethnies. Le Malawi est peuplé des mêmes ethnies que ses voisins, mais il n'y a aucun conflit. De même d'un point de vue religieux, le Malawi est essentiellement chrétien (d'une manière parfois vraiment inculturée, en cohérence avec la culture locale, magnifique) avec des communautés très variées. Il y a également une population musulmane importante, mais il n'y a aucun problème. La malawaiens sont très fiers de leur chaleur humaine et de la paix qui règne dans leur pays. Nous nous demandons si il y a un ingrédient magique dans l'eau du lac.
Les problèmes du Malawi sont pourtant multiples : la pauvreté (revenu moyen annuel par habitant de 250 $), l'aide internationale trop importante (40% du budget annuel du pays) et parfois mal adaptée (projets court-termistes, sans implication des locaux, politiques, pour se donner bonne conscience, qui générent une culture d'assistanat...), le SIDA (~10% des malawaïens seraient séropositifs, ce qui fait du Malawi un des pays les plus touchés), le poids du tabac dans l'économie du pays (la moitié des exportations) alors que la sorte de tabac produite au Malawi risque d'être interdite prochainement par 200 pays, la déforestation, le changement climatique dont les effets prennent apparemment de l'ampleur...
Mais comme nous ont dit certains, il y a toujours eu de gros problèmes au Malawi, et cela n'a pas empêché les gens de garder leur sourire...

Clichés
Le Malawi est un pays qui nous a aussi invités à réaliser à quel point nous avons des clichés simplistes sur l'Afrique en Europe (et en général). Les africains ne sont évidemment pas tous fainéants, assistés, soumis à leurs pulsions comme des animaux, avec une culture détruite et une religion imposée par l'Occident. La réalité est beaucoup plus intéressante, et positive.
A ce titre nous avons par exemple beaucoup aimé le regard de Brother Aiden, un frère de Saint Jean de Dieu qui développe depuis 18 ans un hôpital pour les maladies mentales à Mzuzu, employant aujourd'hui 150 personnes. Il nous a d'abord expliqué que contrairement à ce que nous imaginons en Europe, les maladies mentales ne sont pas le "privilège" des pays riches :  il y en a la même proportion au Malawi (dépressifs, schizophrènes, alcooliques, épileptiques, paranoïaques, de plus en plus de gens trop stressés, des gens qui ont des séquelles de naissances difficiles...  Mais pas d'anorexie...). En revanche au Malawi les gens ont très peur des personnes atteintes par ces maladies, excluent les familles qui ont un membre malade, et très peu de structures permettent de soigner les malades. Le travail à faire est donc considérable car il faut prévenir, soigner et éduquer. Mais Brother Aiden est quelqu'un de très positif : il sait bien qu'il reste énormément à faire, mais reconnaît que beaucoup de travail a été fait depuis 18 ans, et le fait de ne pas pouvoir tout régler lui semble normal. Il fait de son mieux avec une simplicité, une humilité et une espérance à toute épreuve.

Laissons-nous inspirer :
Le Malawi et sans doute l'Afrique en général ont vraiment de quoi nous apporter : il y a une chaleur humaine, un sens de la communauté et des autres, et un sens de l'accueil que nous avons un peu perdus, ou peut-être jamais eu avec cette intensité. Il y a un sens spirituel et une joie de vivre qu'on ne trouve pas souvent en Europe.
Du coup, en ajoutant à ces aspects le climat fabuleux du Malawi et son lac extraordinaire, nous nous demandons si il ne serait pas pertinent d'ouvrir des maisons de retraite au Malawi : plutôt que de laisser croupir certaines de nos personnes âgées peu aisées et qui n'ont plus de familles dans des établissements  en France où elles ne sont peut-être pas toujours si bien traitées, ne pourrait-on pas leur assurer une vieillesse plus chaleureuse au bord du lac Malawi, tout en donnant du travail à des malawaïens ? A creuser, dans le respect des personnes âgées bien sûr.
Certains nous avaient dit avant notre départ "Vous allez vous embêter si vous restez un mois au Malawi". Mais en partant nous avons réalisé que ce mois avait été extrêmement riche et que nous aurions beaucoup aimé rester un peu plus. Peut-être reviendrons-nous...
Pour ceux qui sont curieux de ce pays, n'hésitez pas à lui rendre visite, vous ne serez pas déçus. En revanche, par pitié, ne donnez rien aux enfants, soyez responsables à tous points de vue pour ne pas dénaturer ce pays encore si authentique.

Enfin, comme c'est grâce à notre "cousin" Edward que nous avons décidé de visiter ce pays, et comme c'est en grande partie grâce à ses parents Eric et Sophie et à sa soeur Bella que nous avons eu un séjour si exceptionnel, un immense merci à la famille Borgstein !

source : http://web.worldbank.org fiche pays malawi

La religion et les catholiques au Malawi

Religions traditionnelles
Les religions traditionnelles des ethnies malawaïennes sont monothéistes. Les Chewas, la population la plus importante au Malawi, croient en un Dieu créateur (qui aurait créé un homme et une femme sur la terre, mais aurait été repoussé au ciel par la catastrophe de l'invention du feu), vénérent les bons esprits des ancêtres, et se méfient des mauvais esprits des gens mauvais trépassés. Tout un système moral est décrit par le "gule wamkulu", un ensemble de danses traditionnelles avec des masques représentant différents personnages et comportements bons ou mauvais, pour s'en inspirer ou les railler. Cette danse est notamment utilisée lors de différents rites de passage comme celui de la puberté pour éduquer les jeunes hommes d'un côté et les jeunes filles de l'autre. On éduque les jeunes, et on leur fait notamment passer le message : "ton nom est lié à ton sexe (selon si tu es un garçon ou une fille). Ne montre pas ton sexe à n'importe qui, ne l'utilise pas n'importe comment ou tu perdras ton identité." De manière générale, chez les Chewas mais aussi chez les Ngonis et les Yaos, l'adultère est proscrit. Les Yaos disent "adultery leads to one's destruction", et chez les Ngonis (ethnie proche des Zoulous d'Afrique du Sud ayant immigré au 19e siècle) une fille doit même absolument être vierge pour se marier. Il y a bien sûr beaucoup d'autres éléments intéressants, mais ceux-là nous ont paru particulièrement inattendus pour notre regard un peu simpliste d'européens.


Missionnaires
Le premier missionnaire à être venu au Malawi est le fameux Docteur Livingstone. (Un explorateur missionnaire écossais protestant perdu dans la jungle tanzanienne à la recherche de la soruce du Nil et retrouvé par le journaliste Stanley qui aurait dit en le rencontrant : "Dr Livingstone I presume ?"). Son objectif était notamment d'apporter aux africains "Commerce, Christianisme et Civilisation" (dans cet ordre, avec pragmatisme).

Les missionnaires protestants arrivèrent en premier au Malawi, suivis assez vite par les catholiques. Ces missionnaires se focalisèrent sur l'éducation, et à côté de cela convertirent petit à petit tout le pays. Chez les catholiques, deux congrégations d'origine française vinrent au Malawi : les pères blancs (Les missionnaires d'Afrique, fondés par le cardinal Lavigerie en 1868) au Nord, et les montfortains (La compagnie de Marie fondée par Saint Louis-Marie Grignion de Montfort en 1705) au Sud.

De nombreux missionnaires arrivèrent avec l'idée très répandue à l'époque (et encore aujourd'hui ?) que les africains étaient inférieurs, et donc qu'il fallait absolument leur apporter, voire leur imposer la religion et la civilisation européenne. Beaucoup n'eurent que peu de respect pour les cultures locales mais certains eurent un vrai souci de comprendre et de respecter les locaux et leur culture. Ainsi à Mua, les pères blancs ont commencé par rejeter les danses du Gule Wamkulu qu'ils ne comprenaient pas, et qui leurs paraissaient obscènes à cause des références sexuelles destinées à éduquer les adolescents. Mais l'un d'eux, le frère Jean-Baptiste Champmartin, trouva simplement que c'était une sorte de cinéma local. Ce père blanc resta 43 ans à Mua, jusqu'à sa mort à 70 ans. Ouvert, plein de bon sens et appréciant chacun et chacune telle qu'il était, il a cherché vivre avec les gens de Mua et à les comprendre : il devint extrêmement apprécié par les locaux qui le surnommèrent "Chamare" et se souviennent encore de lui. Par son ouverture, son respect et son humilité il jeta les fondations d'un dialogue respectueux et critique entre la religion et culture occidentale et la religion et culture malawaïenne. C'est ce qu'on appelle l'inculturation. Plus tard, en 1976, le père Boucher, surnommé "Chisale" par les gens de Mua, fonda l'extraordinaire centre culturel KuNgoni dont nous avons déja parlé, qui s'est attaché à comprendre et à préserver un maximum d'informations sur les cultures locales, et sur les
fameuses danses du Gule Wamkulu.


Inculturation
L'inculturation est donc le dialogue qui permet à une culture d'embrasser la religion catholique tout en gardant ses racines et son sens critique, et qui permet en retour d'enrichir la religion catholique de nouveaux points de vue et de nouvelles pratiques. Après une phase plutôt monolithique et rigide au départ, l'Eglise catholique du Malawi s'est petit à petit ouvert à ce processus.

Concrètement, à Mua, l'inculturation se voit depuis les années 1970 dans les oeuvres produites : les artistes du centre culturel KuNgoni s'inspirent de la vie, de la symbolique, des images et des mythes malawaïens, et les utilisent pour représenter, s'approprier voire enrichir des concepts catholiques. De la même manière la liturgie de la mission de Mua est enrichie de chants et de danses traditionnelles revisités.

Sous la direction de l'évêque malawaïen Patrick Kalilombe, une autre initiative d'inculturation est apparue dans les années 1970 : enrichissant la vie de l'Eglise du sens de la communauté qui est si important en Afrique, le concept de "small catholic communities" a été développé. Concrêtement, il s'agit pour les fidèles laïcs de se rassembler en petit groupe d'une vingtaine de personne pour vivre leur foi ensemble. Ce sont comme des sous-groupes au sein des paroisses, parfois consacrés à un saint, qui vont à la messe ensemble et se retrouvent pour discuter, réfléchir, se former, prier ensemble, soutenir moralement et financièrement ceux qui en ont besoin...

Ces "petites communautés catholiques" ont eu un succès extrêmement important et ont aussi participé à un mouvement de conscientisation des gens, qui aurait inquiété le dictateur Banda : en 1979 l'évêque Patrick Kalilombe a été expulsé du pays, pour des raisons non divulguées. L'Eglise Catholique malawaïenne, sans doute échaudée et apeurée, s'est alors un peu endormie, et sa hiérarchie n'a plus trop osé prendre d'initiative révolutionnaire.

Pourtant, au grand étonnement de beaucoup, en 1992 (soit 3 ans après la visite de Jean-Paul II au Malawi en 89, qui est probablement liée à ces événements), les évêques malawaïens catholiques ont publié une lettre pastorale très courageuse, dans laquelle ils ont dénoncé l'injustice sociale, la corruption, la violation des droits de l'homme, et les erreurs du gouvernement. Ils ont aussi alors appelé toutes les autres églises chrétiennes à se joindre à un dialogue sur ces questions. La réaction du dictateur ne s'est pas faite attendre et les évêques ont été questionnés, menacés, et l'un d'eux a été expulsé du pays. La lettre pastorale a été interdite, des paroissiens ont été harcelés, des propriétés de l'Eglise ont été confisquées, le site d'impression de la lettre a été brûlé, une vague d'emprisonnements sans procès a eu lieu, et des étudiants qui ont protesté ont été tués. Les troubles ont débouchés sur une instabilité politique qui a finalement donné lieu à un référundum sur un système multipartiste, et à l'arrivée de la démocratie.


Aujourd'hui
Aujourd'hui, 75% des malawaïens sont chrétiens et 12% sont musulmans. Les relations entre les confessions et religions sont historiquement bonnes. Il y a aussi quelques hurluberlus qui s'auto-proclament évêque ou cardinal de leur nouvelle église. 20% des malawaïens sont catholiques, et d'après le père Sam, l'Eglise catholique est très dynamique, innovante, et est celle qui attire le plus grâce à une inculturation avancée.

L'Eglise catholique est aussi un acteur important dans de nombreux domaines : éducation, soins médicaux généraux (toutes les missions comporte une école et un hôpital, et certaines sont vraiment très importantes), soins des maladies mentales, distribution de repas (notamment par l'organisme "Mary's meals" autour de Blantyre), soins aux séropositifs (notamment Sant Egidio à Blantyre)... Les autres églises et religions sont aussi bien sûr très actives.

Messes et rencontres
Nous sommes allés deux fois à la messe à la cathédrale de Blantyre, qui était archi-remplie à tous les services (3 services le dimanche matin), de noirs de toutes classes sociales confondues. En allant aux services en anglais, très proches de ce que nous connaissons en Europe et ne durant qu'une heure, nous avons pu comprendre quelque chose malgré l'accent du prêtre malawaïen : nous l'avons trouvé très fin et nous nous sommes bien retrouvés dans ses messages.

Nous sommes aussi allé à la messe dans le petit village de Likhubula, au pied du Mont Mulanje : l'église était là aussi pleine. En revanche tout était en chichewa. Nous avons été très bien accueillis, invités à nous présenter en 2 mots devant toute l'assembée et applaudis avec chaleur. Nous avons salué le prêtre mais il ne parlait presque pas anglais.

Nous n'avons malheureusement pas pu allé à la messe à Mua, mais avons entendu que l'église était systématiquement comble, et que hors des périodes de Carême, il y avait une liturgie inculturée qui nous aurait sans doute beaucoup intéressés. Et nous avons rencontré le fameux père Boucher (canadien), fondateur du centre culturel KuNgoni qui nous a beaucoup parlé d'inculturation, et que nous avons trouvé un peu pessimiste sur la culture malawaïenne qu'il voit se dissoudre dans la fascination pour l'occident.

A Nkhata Bay, nous avons eu la chance d'assister à la formation d'une "petite communauté catholique" lors de la messe : la vingtaine de membres, essentiellement féminins, s'était habillée dans une sorte d'uniforme et a formulé des voeux. Cette messe là a duré presque 3h, les chants étaient magnifique, dirigés par un type très précis. Parfois des gens se levaient pour danser un peu sur place ou crier de joie. Et surtout nous avons rencontré le père Samuel, qui nous a invité à déjeuner, et que nous avons revu pour boire une bière 2 jours plus tard. Nous avons beaucoup parlé et découvert un jeune curé malawaïen confiant et sage.
Enfin, nous avons rencontré à Mzuzu le Brother Aiden, frère de St Jean de Dieu irlandais, qui nous a parlé des maladies mentales au Malawi. Un type positif, vraiment bien.

Conclusion
En conclusion nous avons été très enthousiasmés par cette Eglise qui bouge, qui progresse depuis le début du XXe siècle, et qui a tant à apporter à l'Eglise et à l'Occident en général. Finalement ce concept d'inculturation pourrait être élargi hors du contexte catholique et s'appliquer à tout dialogue, à toute relation interreligieuse, interculturelle et voire interpersonnelle. Il s'agit de générer un dialogue critique et constructif dans le respect des deux entités dialogantes. De la même manière d'autres concepts de l'Eglise devraient nourrir les débats : ainsi le concept de "développement intégral" de l'homme se rapproche beaucoup de la "vision holistique", ou du concept d'entreprise responsable, sociale, écologique... tant à la mode aujourd'hui, à juste titre. Dans tous ces cas, il s'agit juste de vouloir prendre en compte tous les paramètres quand on parle d'homme ou d'entreprise ou de projet. Mais pour que la voix de l'Eglise, fruit d'une sagesse (et d'erreurs dépassées) accumulée et ruminée depuis 2000 ans, puisse servir à tous, encore faut-il que tous (et même les catholiques !) prennent le temps de regarder ce qu'elle dit, avec un regard honnête, purifié de ses préjugés...

source : African Theology in Images, Martin Ott

Monday, April 18, 2011

Florilège de petites phrases recueillies au Malawi

"La distance la plus courte entre deux personnes, c'est un sourire"

"Ce n'est pas la peine d'ouvrir une boutique si tu n'aimes pas sourire" - proverbe chinois

"I am because you are, and because you are, therefore, I am" or “A person is a person through persons”, devise de l'uMunthu, la philosophie malawaienne du vivre-ensemble (correspondant probablement au "ubuntu" d'Afrique sub-saharienne)

"I'd rather be poor in Malawi than in a European city", Eric

"You have to employ local people. They just need jobs", Sophie

"Aider vraiment n'est pas facile. C'est beaucoup plus compliqué que ce que l'on pense souvent", Père Boucher, fondateur du centre culturel KuNgoni

"Two roads diverged in a wood, and I -
I took the less traveled by,
And that has made all the difference. "
The Road Not Taken, Robert Frost, poëte américain

" De toutes façons tout est faux la télévision ", un journaliste de Malawi Broadcasting qui nous a fait "jouer" pour un documentaire.

"La richesse matérielle n'est rien sans richesse spirituelle", Father Sam

"The one lesson we learn unequivocally from Europe's past is that when we close the door, we lose. And if that were true in times gone by, how much more true it is today in the era of rapid globalisation where technology, in the form of mass and social media, is shrinking the world." Tony Blair, article "Religion, respect and revolution" in the Tablet 12/03/2011

"The man who doesn't read good books has no advantage over the man who can't read them", Mark Twain

Tuesday, April 12, 2011

Le Malawi en quelques chiffres et photos





30 jours, 13245861 sourires, 16 trajets en minibus surbondés (et autant d'heures à faire le tour de la ville pour trouver les passagers anquants qui permettront au minibus d'être surbondé et donc de partir), 2 angines carabinées, 10 bracelets brésiliens distribués à des inconnus dans des bus, 5 repas à base d'avocats et de bananes, 30 personnes à l'arrière d'un pick-up pour aller à Cape McLear (sans compter les sacs à dos, les sacs de maïs, les fagots de bois, etc), 3 trajets en velo-taxi, 35097 poissons de toutes les couleurs vus dans le lac, 1 nuit à dormir sur le pont du Ilala pendant l'orage, 218 "artistes" cherchant a vendre des souvenirs, 5 heures passées dans le musée du KuNgoni à en apprendre plus sur les différentes ethnies du Malawi, 6 (au moins) bouteilles de sauce Nali piquante à l'ail consommées par Clem, 4 matchs de foot observés (dont un où on a du participer), 3 coupures de courant et une coupure d'eau, 1 cours de cuisine avec traduction simultanée dans un village, et toujours toujours de la bonne humeur et des sourires magnifiques.

Pour voir nos photos preferees : https://picasaweb.google.com/clemetstan/Malawi?feat=directlink


Pour voir une petite selection des beaux sourires du Malawi: https://picasaweb.google.com/clemetstan/SouriresDuMalawi?feat=directlink