Sunday, February 26, 2012

Carnaval !


Dans la tradition chrétienne, le "Mardi Gras", est un jour de défoulement et d'excès, avant d'entrer dans l'austérité du Carême. Apparemment, au Brésil, un jour ne suffit pas du tout, et c'est officiellement quatre jours (officieusement beaucoup plus) qu'il leur faut. De très loin la fête la plus importante de l'année à Rio de Janeiro (mais aussi à Salvador de Bahia et Olinda, ainsi que de nombreuses plus petites villes), la ville entière arrête de tourner pour faire la fête.

cette photo n'est pas de nous
nous n'avons pas assisté aux défilés du Sambodromo
Le carnaval comprend plusieurs volets. Celui qu'on à en tête depuis l'étranger, c'est les défilés des écoles de samba. Il existe environ une quarantaine d'écoles de Samba à Rio, classées en divisions selon leur niveau de performance. Chaque école prépare son défilé, véritable spectacle d'une heure vingt, pendant un an : choix d'un thème, composition d'une chanson, chorégraphie, élaboration et réalisation des costumes, répétitions, etc. Le carnaval venu, chaque école (de la première division) défile à son tour dans le "Sambodromo", avec entre 3500 et 4000 membres, dont des portes drapeaux, la "bateria" qui bat la mesure, des femmes en bikini à paillette avec des plumes dans les fesses qui dansent la samba sur des immenses chars, et les autres participants répartis en une trentaine d'alas, c'est à dire des groupes costumés dont les tenues reflètent le thème choisi pour l'année, tout en chantant la chanson en boucle, pendant une heure vingt. Les défilés ont lieux de nuit, entre 22h et 7h le lendemain matin, et sont sujets à un système de notation qui prend en compte la réalisation du thème, l'énergie du groupe, si la bateria arrive à maintenir le rythme pendant l'ensemble du défilé, si le temps limite est atteint mais non dépassé, ainsi que tout un tas d'autres éléments. Le classement est annoncé à la fin du carnaval.
cette photo n'est pas de nous
nous n'avons pas assisté aux défilés du Sambodromo
Mais finalement, cela n'est pas le "vrai" carnaval des cariocas (car c'est ainsi qu'on appelle les habitants de Rio). Celui-ci se déroule dans les rues de toute la ville.




Car pendant quatre jours, les cariocas se déguisent quasiment tous, et descendent dans la rue pour faire la fête, et cela dès 9h du matin ! Ils rivalisent de créativité pour fabriquer leurs déguisements (dit "fantasia" en brésilien) et rentrent vraiment dans leur personnage. De nombreux hommes, et des plus machos, se déguisent en femme.

Les groupes d'amis de quartier forment des "Blocos de rua", qui se rassemblent tout au long de la journée pendant les 4 jours, pour jouer de la musique et défiler dans la rue, entourés et accompagnés d'une masse de gens en costume qui chantent les airs qu'ils connaissent en dansant. Il y a des blocos pour tous les goûts : pour enfants, traditionnels, plus modernes, ambulants ou fixes, petits ou grands, avec ou sans haut parleurs. Le point commun est la bonne humeur et l'esprit bon enfant de tout ce beau monde.

le très populaire bloco "Sargento Pimienta" qui fait des reprises des Beatles

Nous avons profité de nos amis cariocas Leo et Maria qui nous ont hébergé, emmené voir des blocos très sympa, et nous ont expliqué plein de choses. Muitos Obrigados !

Voici les photos desmeilleurs déguisements que nous ayons vus dans les rues de Rio




Friday, February 24, 2012

Quelques réflexions en quittant l'Argentine

Autant l'annoncer tout de suite, l'Argentine nous a tellement plu que Buenos Aires est devenue notre ville "back-up" : c'est là que nous irons tenter notre chance si nous ne trouvons pas depuis la France un emploi dans un endroit qui nous plaît avant janvier prochain. (enfin, c'est notre choix pour l'instant...)
le bar la poesia, notre QG à San Telmo (Buenos Aires)

Pourquoi ? Parce qu'après notre passage en Asie et en Océanie, nous avons retrouvé avec beaucoup de joie la chaleur humaine et le savoir-vivre latins. Stan a grandi à Barcelone, Clem a étudié à Madrid, nous sommes très sensibles au mode de vie latin et nous l'apprécions.


Rencontres et savoir-vivre

Nous avons aussi eu à Buenos Aires des rencontres impromptues passionnantes, dont certaines que nous avons pris pour des signes :   en nous voyant passer dans la rue le tenancier d'un bar nous a offert une bière pour nous montrer un documentaire sur Maradona et nous faire partager sa passion pour "El Diego" ; en voulant jeter un oeil dans une institution culturelle qui était fermée, nous avons croisé un de ses dirigeants qui y arrivait, a pris le temps de nous faire visiter, de nous inviter à prendre un café et de nous raconter son travail et sa vie ; en cherchant un livre dans une librairie nous avons rencontré un libraire chilien extraordinaire que nous avons revu plusieurs fois pour discuter des heures, avec qui nous nous sommes beaucoup liés et avec qui Stan se verrait bien travailler sur des projets culturels ; au bar "La Poesia" de San Telmo où nous avions nos habitudes nous avons rencontré par hasard un des fondateurs d'une start-up internet argentine que nous avons du coup visité et dans laquelle Clem pourrait se voir travailler... Et nous avons eu la chance de rencontrer des contacts, cousins, amis d'amis qui nous ont tous extraordinairement bien accueillis et séduits.

Pour nous l'Argentine, c'est plein de choses : des paysages magnifiques, et incroyablement variés ; un savoir-vivre très appréciable, voire indispensable : de la viande excellente (que les argentins mangent plutôt cuite), du bon vin abordable, du "dulce de leche" - une sorte de caramel -, une cuisine souvent italienne, de nombreuses traditions conviviales comme l'asado - une sorte de barbecue - ou le maté - une herbe énergétique qui s'infuse et se boit en permanence à plusieurs avec un cérémonial étudié -, un vrai goût pour la culture... Surtout, les gens prennent le temps, sont curieux, chaleureux, intenses, passionnés. Leur culture est proche de la nôtre - quasiment tous ont au moins un ancêtre italien, espagnol ou français -, mais teintée d'autres éléments appréciables (par exemple, le maté, qui est une véritable institution en Argentine, vient des indiens guaranis). Les gens ont aussi plus de légèreté et d'optimisme qu'en Europe : sans être non plus d'un optimisme vraiment débordant, les argentins sont plus sereins que les européens. Les crises ils en ont vécu plein, et finalement ils vivent avec, ils se débrouillent toujours. En Europe, en s'angoissant on aggrave sans doute le phénomène, et on le vit d'autant plus mal.


Problèmes

Bien sûr l'Argentine est un pays qui a des problèmes, comme tous. C'est un pays qui a eu une histoire mouvementée, parsemée de crises et de dictatures dont la dernière a laissé des blessures encore douloureuses (vous pouvez retrouver l'histoire émouvante d'Yves Domergue, un des "disparus" français). C'est aussi un pays à la société fragmentée : si nous avons surtout rencontré des gens éduqués et fins, nous avons entrevu qu'il y avait plusieurs classes sociales qui ont du mal à se mélanger, voire à vivre ensemble : A la tombée de la nuit à Rosario - la troisième ville du pays -, les bords du fleuve Parana éclairés d'une lumière type néon se remplissent de familles peu aisées et bouffies par la malbouffe qui sortent des tables de pique-niques et se mettent à pêcher juste à côté des panneaux "interdit de pêcher" avec leur cannes à pêche rutilantes. Au même moment à 3 km de là, les gens aisés beaux et sveltes sortent en foule pour faire leur jogging sur le sentier vert au milieu d'une avenue bordée de jolies maisons qui hébergent des club de fitness et des cliniques de chirurgie esthétique... Nous nous sommes aussi parfois arrachés les cheveux sur des systèmes absurdes : certains systèmes de transports très mal fichus (à Bariloche) ou le système de téléphone par exemple, avec des préfixes à ajouter de façon incompréhensible même pour les locaux (si vous voulez "rire" de ce système de téléphone, allez voir ce lien)

Il y a également un problème de drogue, particulièrement préoccupant depuis que l'Argentine est devenue en 2001 productrice d'une drogue bon marché qui fait des ravages chez l'utilisateur et aggrave la criminalité. L'économie semble aussi un peu instable, avec notamment une énorme dépendance au soja transgénique produit pour la Chine - dont certains disent que l'impact environnemental est catastrophique -, et des crises régulières (la prochaine fois quand la Chine arrêtera d'acheter ce soja, où quand les terres appauvries ne produiront plus rien ?). Nous ne savons que trop penser de la politique locale, sur laquelle nous avons entendu tout (enfin un gouvernement qui fait ci et ça...) et son contraire (un gouvernement qui claque tout sans investir assez...) sans avoir le temps de bien creuser. Nous étions en Argentine au moment des 30 ans de la guerre des Malouines : c'est un des rares thèmes politiques sur lequel tous les argentins nous ont semblés unis, et qui nous a montré à quel point ils sont fiers, mais aussi passionnés.



Passion

Car s'il nous fallait retenir un aspect pour caractériser les argentins, ce serait la passion. Que ce soit pour le foot, pour la politique, pour le maté... les argentins sont des gens qui sont intenses et passionnés. Ils ont tous quelque chose qui leur tient vraiment à coeur. A la différence par exemple de leurs voisins chiliens (nous en avons rencontrés et beaucoup appréciés quelques uns) qui nous ont semblés en général un petit peu plus raisonnés, voire pragmatiques.

Finalement, en Argentine il nous a semblé retrouver un peu de la chaleur humaine qui nous avait tant plu en Afrique, ainsi qu'un peu d'Europe avec la gastronomie et la culture. C'est aussi un pays "où tout n'est pas écrit", où il y a de l'informel (qu'est-ce qu'elle manque en Europe l'économie informelle ! En Europe, si on a des poires dans son jardin, on ne peut pas les vendre dans la rue...), des choses à faire et à inventer... Et il y a chez les argentins un savoir-vivre, un grain de folie (ou de sagesse ?) et une passion attachantes qui rendent les relations et la vie plus intenses et plus vraies.

Thursday, February 23, 2012

Florilège de petites citations recueillies en Argentine

- "En une cabeza con miedos non hay espacio para los suenos" (dans une tête pleine de peurs, il n'y pas de place pour les rêves)

-"Si lloras por haber perdido el sol, las lagrimas no te dejaran ver las estrellas", Rabindranath Tagore (si tu pleures parce que le soleil est parti, tes larmes t'empecheront de voir les étoiles)

- "Si on s'installe dans un pays, il faut décider de l'aimer et être fier de ce qu'il a de bon. On a besoin de racines.", le père de la famille G qui a immigré en Argentine, cité par une de ses filles.

- "What you do with your life is only half of the equation - the other half, the most important half is who you are with when you're doing it", Sophie H (ce qu'on fait de sa vie n'est que la moitié de l'équation - l'autre moitié, la plus importante, c'est avec qui on le fait)

-"Just as with good health, one only truly appreciates things once one has lost them" Sophie B 

- "L'important n'est pas d'être le premier amour d'une fille, c'est d'être le dernier.", Jorge

- "On ne peut pas comprendre l'histoire et la politique argentine si on ne comprend pas l'histoire et la politique internationale" 

- "A la limite je peux te prêter ma femme, mais le maillot de mon équipe de foot, jamais !" jorge

- "l'important dans la vie c'est de se relever", jorge

- "Podran cortar todas la flores pero no detendran la primavera" (ils pourront couper toutes les fleurs, mais ils n'auront pas le printemps pour autant)

- "Si j'avais connu cet amour avant, je n'aurais pas fait ce que j'ai fait" - un meurtrier sorti de prison et placé dans la maison "casa de la bondad" de Manos Abiertas parce qu'il était en phase terminale de cancer, et qui a dit ça, en parlant de l'attention qu'il avait reçu avant de mourir 

- "Siempre que haya un hueco en tu vida, llenalo de amor" Padre Hurtado (chaque fois qu'il y a un trou dans ta vie, remplis-le d'amour)

- "Savoir vivre au présent, ne pas sacrifier le plaisir à l'argent", Carmelo

" Si ocurre algo mal bebes para olvidarlo,
Si ocurre algo bueno bebes para celebrarlo,
Y si no pasa nada bebes para que pase algo... "   Charles Bukowsky

L'Argentine en quelques chiffres et photos

8241 chiens qui se dorent la pilule au soleil en faisant le mort au milieu du trottoir, 10 minutes pour engloutir un pot de dulce de leche (pour clem), 16 kilomètres arpentés à pied dans Buenos Aires, 503 photos de cascades prises à Iguazu, 34 litres de maté bus, 7789 kilomètres parcourus, 83 touristes israéliens croisés, 118 heures de bus, 12 navets hollywoodiens vus dans les bus en question, 17 voitures croisées en patagonie (en 23 heures de bus), 29 gens rencontrés grâce à oncle thibaut et tante monique, 19 vins goûtés, 6 nuits passées dans des bus, 11 repas pris à « la poésia » (en 6 jours à Buenos Aires), 5 vaches mangées (bife de chorizo, bife de filet, asado de tira, matambre...), 154 chutes vues à Iguazu, 495 tatouages, 8 litres de glace au dulce de leche engloutis, 250 quinquagénaires qui dansent le tango comme des pros, 5 films argentins (dont 3 avec ricardo darin), 31 lacs vus en patagonie, 5 chiliens sympas rencontrés en Argentine 163 pècheurs sous le panneau « interdit de pècher » à Rosario, 247 pancartes « les Malouïnes sont argentines » vues à travers le pays.

NDLR : certains chiffres sont parfois un peu exagérés... merci de ne pas nous en tenir rigueur.

Voici nos photos préférées d'Argentine : https://picasaweb.google.com/111032676319290923536/Argentine

Voici la mosaïque de nos belles rencontres en Argentine :


Thursday, February 16, 2012

Muchas Gracias !


Muchas gracias a todos los amigos encontrados en camino, en Chile y Argentina :

Gracias a Cesar y su hijo Gaspar para convencernos de visitar Torres del Payne con ellos. Gracias a François y Estella y todo su familia que vimos en Lago Puelo, en particular Chantal y Tristan y sus hijos, Anna y Guiilermo, Annick, y Diana, para acogernos y hacernos sentir como familia. Gracias a Freddy y Juilet para su acogida en Bariloche. Gracias a Jorge y Benedicte para vernos en Buenos Aires, y para el excelente helado al dulce de leche. Gracias a Juan que nos conto todo sobre la pasion de su vida : Diego Maradona. Gracias a Jorge el librero para contarnos todo de su vida increible, aconsejarnos sobre peliculas y libros, y para los zapatos. Gracias a Mariano de la Casa de la Cultura, por contarnos tanto del funcionamiento de su ministerio. Muchas gracias à Eric y Veronica, por contarnos todo sobre sur pais, la dictadura y los desaparecidos, tanto como el lugar de la mujer. Gracias a Edgardo por enseñarnos su empresa. Gracias al padre Ismael por su acogido en Monte Coman y su tiempo. Gracias a Nestor por hablarnos de las carreras automoviles. Gracais a Damian por su tiempo y por la cena en Puerto Madeiro. Gracias a los dos mendocinos que nos llevaron con las bicicletas rotas. Gracias a Martin e Ines para su acogida en Cordoba, los almuerzos y el mate en la terraza. Gracias a Buchi e Elvira por su acogida en Villa Allende, el almuerzo y por enseñarnos Manos Abiertas. Gracias a toda la buena gente de Manos Abiertas : Maria Cristina, Eugenia, Javier, Alejandro, Cecilia y los demas. Muchas gracias a Bartolomé y Maria por prestarnos su lindo departamento en Cordoba mientras apenas nos conocian. Gracias a tio Thibaut y Tia Monique por compartir sus buenas dirrecciones en Argentina. Gracias a Angeline por su tiempo para hablar de Argentina y para sus consejos. Gracias a Philippe por venir a visitar las cataratas de Iguazu con nosotros.

En terre jésuite

les restes de la mission de San Ignacio Mini

Fondée en 1540 par Saint Ignace de Loyola, la Compagnie de Jésus est un des ordres religieux qui à le plus marqué le sud de l'Amérique latine, et en particulier l'Argentine. En effet, à peine le nouveau continent découvert et colonisé par les couronnes espagnoles et portugaises, différents ordres (franciscains, dominicains, et autres) y envoient des prêtres pour convertir les païens qui peuplent ses terres. Dans l'ensemble leur succès n'est pas retentissant, et les colons eux voient en ces indiens d'Amérique plus des esclaves à envoyer dans les mines ou les plantations que des âmes à sauver.

violon fabriqué par les indiens guaranis
Les jésuites arrivent sur le continent dans les années 1560, à peine vingt ans après la formation de leur ordre. Réputés à la fois pour leur importante formation intellectuelle et leur pragmatisme, ils abordent les indiens locaux d'une nouvelle manière. Ils commencent par apprendre les différentes langues des indiens, et étudient leur coutumes. Plutôt que de leur faire adopter un mode de vie européen du jour au lendemain, ils essaient de voir quelles coutumes sont compatibles avec le christianisme, et lesquelles sont absolument incompatibles (la polygamie, et le cannibalisme, par exemple). Ils parlent du Christ aux indiens dans leur propre langue, et à travers des médias qu'ils connaissent et aiment, comme la musique chez les indiens Guarani du sud du Brésil.

Avec pour objectif l’évangélisation des peuples originaux, ils ne peuvent tolérer les raids des chasseurs d'esclaves portugais et dès les années 1600 ils commencent à former au brésil des missions, communautés regroupant plusieurs milliers d'indiens et dirigées par un ou deux jésuites. Ce regroupement rend les indiens moins vulnérables au rapt par les chasseurs esclaves, et c'est ce risque d'esclavage qui pousse de nombreux chefs indiens à venir rejoindre les missions, malgré la perte d'autorité que cela représente pour eux.

Les missions ont toutes le même schéma d'organisation : centrée autour d'une grande place, il y a d'un côté l'église, le collège, les ateliers de travail (travail du bois, du fer...) et le cimetière, et des trois autres côtés de la place s'étendent les maisons pour les familles, les dortoirs pour les jeunes garçons entre 12 et 17 ans qui sortent de leur famille pour être instruits, et la maison pour les veuves et orphelins qui sont pris en charge par la communauté (repris de l'organisation des communautés guaranies). Le jésuite est l'autorité suprême de la mission et la vie s'organise autour des temps de célébration et de prière. 3 jours par semaine, chaque famille travaille son lopin de terre pour elle même, et 3 jours par semaine, elle travaille la terre de la communauté. Le dimanche est le jour de repos, consacré à la prière et la musique. On apprend aux adolescents à lire, et à pratiquer un métier. Pour éviter la fornication en dehors du mariage, et aussi parce que les indiens Guarani ont une espérance de vie de 35 ou 40 ans, on marie les garçons à 17 ans et les filles à 15 ans.

Mais les chasseurs d'esclaves ne se laissent pas abattre et attaquent les missions brésiliennes de façon répétée. Les jésuites décident de bouger leurs missions vers le sud à plusieurs reprises et finissent par s'installer dans la région qui aujourd'hui se trouve au croisement des frontières brésilienne, argentine, et paraguayenne. Pour plus de sécurité, en plus de leur métier, on apprend au garçons adolescents à manier les armes dans le but de protéger la mission en cas d'attaque renouvelée.

Non loin de là, dans la ville de Cordoba, les jésuites remplissent une autre mission qui leur tient à cœur : l'éducation. Ils fondent l'Université de Cordoba en 1610 au départ ouverte pour les élèves de l'ordre, puis ouverte aux autres à partir de 1622, leur enseignant philosophie et théologie. L'Université grandit vite, et à cause de tensions grandissantes en Europe et la Compagnie de Jésus et la couronne espagnole, elle se voit retirer son financement par le gouvernement local et doit trouver une autre façon de faire tourner leur université. Les jésuites créent donc des "estancias", sorte de grande plantation sur laquelle travaillent à la fois de la main d’œuvre payée, souvent indienne, ainsi que des esclaves, souvent d'origine africaine. Il y eut 6 grandes estancias jésuites autour de Cordoba, et 5 existent encore à ce jour. On y cultivait maïs, lentilles, haricots, et on y élevait beaucoup de bétail.
estancia de Alta Gracia, près de Cordoba
Université, missions et estancias furent gérées par les jésuites jusqu'en 1767, lorsque l'ordre fut expulsé de tous les territoires espagnols sur ordre du roi. L'université de Cordoba passa aux mains des franciscains avant d'être mis sous la direction du clergé séculier, puis nationalisé. Les estancias furent abandonnées puis rachetées par des particuliers. Les missions furent réorganisées : un prêtre fut mis en charge des offices religieux, mais souvent ne parlais pas la langue locale. Un administrateur du gouvernement fut imposé pour tous les autres aspects de la vie de la mission, et introduit l'argent pour la première fois dans la mission, où auparavant on ne travaillait que pour nourrir sa famille ou la communauté, ou pour embellir l'église. Les indiens, probablement initiés à l'appât du gain, n'appréciant pas les dérives des nouveaux administrateurs coloniaux, et connaissant les métiers que leur avaient enseigné les jésuites, finirent par abandonner les missions pour aller chercher du travail à la ville.

Ainsi l'influence jésuite pris fin vers le 18ème siècle, ayant toutefois fortement marqué l'histoire de la région.

Monday, February 13, 2012

Les mains ouvertes


Fondée il y a tout juste 20 ans à Buenos Aires, par un jésuite chargé d'une paroisse à cheval sur un quartier aisé et un quartier populaire, l'association Manos Abiertas (les mains ouvertes) avait pour but initial de gérer un "ropero" (un endroit où les personnes peuvent donner de la nourriture ou des habits qu'ils ne portent plus, et qui sont redistribués à ceux qui en ont besoin), en faisant travailler ensemble les paroissiens de classes sociales différentes. Depuis 10 ans, une foule d'autres projets caritatifs ont foisonné, essentiellement à Buenos Aires et à Cordoba, la deuxième ville du pays : un centre d'accueil pour les malades en phase terminale qui n'ont nul part où aller mourir, un centre d'accueil et de réinsertion pour les sans domiciles fixes, un centre pour les mères séropositives et leurs enfants, un groupe de visite aux personnes seules, des foyers pour enfants en attente d'adoption, un pensionnat pour les enfants d'une région montagnarde défavorisée, visites en prison, et j'en passe.

Le maître mot du père fondateur, Angel Rossi, est de redonner la dignité aux hommes.

Nous avons visité deux de leurs œuvres : la Casa de la Bondad (maison de la bonté) qui accueille une quinzaine de malades en phase terminale, et l'Hospederia del Padre Hurtado, qui peut accueillir jusqu'à 40 SDF pour les loger, les nourrir et accompagner leur réinsertion et leur recherche de travail. Nous avons été frappés par une chose surtout : l'organisation impeccable et efficace. En effet, plutôt que de compter sur peu de volontaires à plein temps, l'association à choisi de recruter plein de volontaires qui s'engagent pour 6 mois ou un an, mais seulement 3 ou 4 heures par semaine. Sur chaque créneau horaire, les mêmes équipes de volontaires se retrouvent toute l'année, sans pour autant avoir à donner plus qu'un après-midi ou une soirée par semaine. Ainsi le vendredi soir, une douzaine de personnes se retrouvent au foyer Padre Hurtado, et se répartissent entre la vaisselle du goûter à faire, le dîner à préparer, le tri et rangement des habits donnés ainsi que leur distribution aux nouveaux arrivés au foyer, et ainsi de suite. Les hôtes du foyer, et les malades du centre de soin palliatifs sont appelés les « patroncitos », c'est à dire les « petits patrons », car le but de l’œuvre est d'être à leur service.

L'association à été fondée par un jésuite, et propose aux volontaires qui le souhaitent un accompagnement religieux, mais elle reste ouverte à tous les volontaires, quelle que soit leur croyances religieuses. La seule exigence qu'ils ont est celle-ci : « Aimer et servir ».

Nous avons été séduits par la joie des volontaires et la bonne organisation de l'association. Si vous souhaitez en savoir plus (en espagnol uniquement) rendez-vous sur la page de Manos Abiertas : http://www.manosabiertas.org.ar/

Si vous souhaitez contribuer à Manos Abiertas : : https://www.resnonverba.org/forms/v2/manos-abiertas/1/espanol (attention, le signe $ correspond au peso argentin. Pour information 1€ = 5,7 pesos)