Autant l'annoncer tout de suite, l'Argentine nous a tellement plu que Buenos Aires est devenue notre ville "back-up" : c'est là que nous irons tenter notre chance si nous ne trouvons pas depuis la France un emploi dans un endroit qui nous plaît avant janvier prochain. (enfin, c'est notre choix pour l'instant...)
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le bar la poesia, notre QG à San Telmo (Buenos Aires) |
Pourquoi ? Parce qu'après notre passage en Asie et en Océanie, nous avons retrouvé avec beaucoup de joie la chaleur humaine et le savoir-vivre latins. Stan a grandi à Barcelone, Clem a étudié à Madrid, nous sommes très sensibles au mode de vie latin et nous l'apprécions.
Rencontres et savoir-vivre
Nous avons aussi eu à Buenos Aires des rencontres impromptues passionnantes, dont certaines que nous avons pris pour des signes : en nous voyant passer dans la rue le tenancier d'un bar nous a offert une bière pour nous montrer un documentaire sur Maradona et nous faire partager sa passion pour "El Diego" ; en voulant jeter un oeil dans une institution culturelle qui était fermée, nous avons croisé un de ses dirigeants qui y arrivait, a pris le temps de nous faire visiter, de nous inviter à prendre un café et de nous raconter son travail et sa vie ; en cherchant un livre dans une librairie nous avons rencontré un libraire chilien extraordinaire que nous avons revu plusieurs fois pour discuter des heures, avec qui nous nous sommes beaucoup liés et avec qui Stan se verrait bien travailler sur des projets culturels ; au bar "La Poesia" de San Telmo où nous avions nos habitudes nous avons rencontré par hasard un des fondateurs d'une start-up internet argentine que nous avons du coup visité et dans laquelle Clem pourrait se voir travailler... Et nous avons eu la chance de rencontrer des contacts, cousins, amis d'amis qui nous ont tous extraordinairement bien accueillis et séduits.
Pour nous l'Argentine, c'est plein de choses : des paysages magnifiques, et incroyablement variés ; un savoir-vivre très appréciable, voire indispensable : de la
viande excellente (que les argentins mangent plutôt cuite), du bon vin abordable, du "dulce de leche" - une sorte de caramel -, une cuisine souvent italienne, de nombreuses traditions conviviales comme l'asado - une sorte de barbecue - ou le maté - une herbe énergétique qui s'infuse et se boit en permanence à plusieurs avec un cérémonial étudié -, un vrai goût pour la culture... Surtout, les gens prennent le temps, sont curieux, chaleureux, intenses, passionnés. Leur culture est proche de la nôtre - quasiment tous ont au moins un ancêtre italien, espagnol ou français -, mais teintée d'autres éléments appréciables (par exemple, le maté, qui est une véritable institution en Argentine, vient des indiens guaranis). Les gens ont aussi plus de légèreté et d'optimisme qu'en Europe : sans être non plus d'un optimisme vraiment débordant, les argentins sont plus sereins que les européens. Les crises ils en ont vécu plein, et finalement ils vivent avec, ils se débrouillent toujours. En Europe, en s'angoissant on aggrave sans doute le phénomène, et on le vit d'autant plus mal.
Problèmes
Bien sûr l'Argentine est un pays qui a des problèmes, comme tous. C'est un pays qui a eu une histoire mouvementée, parsemée de crises et de dictatures dont la dernière a laissé des blessures encore douloureuses (vous pouvez retrouver l'histoire émouvante d'
Yves Domergue, un des "disparus" français). C'est aussi un pays à la société fragmentée : si nous avons surtout rencontré des gens éduqués et fins, nous avons entrevu qu'il y avait plusieurs classes sociales qui ont du mal à se mélanger, voire à vivre ensemble : A la tombée de la nuit à Rosario - la troisième ville du pays -, les bords du fleuve Parana éclairés d'une lumière type néon se remplissent de familles peu aisées et bouffies par la malbouffe qui sortent des tables de pique-niques et se mettent à pêcher juste à côté des panneaux "interdit de pêcher" avec leur cannes à pêche rutilantes. Au même moment à 3 km de là, les gens aisés beaux et sveltes sortent en foule pour faire leur jogging sur le sentier vert au milieu d'une avenue bordée de jolies maisons qui hébergent des club de fitness et des cliniques de chirurgie esthétique... Nous nous sommes aussi parfois arrachés les cheveux sur des systèmes absurdes : certains systèmes de transports très mal fichus (à Bariloche) ou le système de téléphone par exemple, avec des préfixes à ajouter de façon incompréhensible même pour les locaux (si vous voulez "rire" de ce système de téléphone, allez voir ce
lien)
Il y a également un problème de drogue, particulièrement préoccupant depuis que l'Argentine est devenue en 2001 productrice d'une drogue bon marché qui fait des ravages chez l'utilisateur et aggrave la criminalité. L'économie semble aussi un peu instable, avec notamment une énorme dépendance au soja transgénique produit pour la Chine - dont certains disent que l'impact environnemental est catastrophique -, et des crises régulières (la prochaine fois quand la Chine arrêtera d'acheter ce soja, où quand les terres appauvries ne produiront plus rien ?). Nous ne savons que trop penser de la politique locale, sur laquelle nous avons entendu tout (enfin un gouvernement qui fait ci et ça...) et son contraire (un gouvernement qui claque tout sans investir assez...) sans avoir le temps de bien creuser. Nous étions en Argentine au moment des 30 ans de la guerre des Malouines : c'est un des rares thèmes politiques sur lequel tous les argentins nous ont semblés unis, et qui nous a montré à quel point ils sont fiers, mais aussi passionnés.
Passion
Car s'il nous fallait retenir un aspect pour caractériser les argentins, ce serait la passion. Que ce soit pour le foot, pour la politique, pour le maté... les argentins sont des gens qui sont intenses et passionnés. Ils ont tous quelque chose qui leur tient vraiment à coeur. A la différence par exemple de leurs voisins chiliens (nous en avons rencontrés et beaucoup appréciés quelques uns) qui nous ont semblés en général un petit peu plus raisonnés, voire pragmatiques.
Finalement, en Argentine il nous a semblé retrouver un peu de la chaleur humaine qui nous avait tant plu en Afrique, ainsi qu'un peu d'Europe avec la gastronomie et la culture. C'est aussi un pays "où tout n'est pas écrit", où il y a de l'informel (qu'est-ce qu'elle manque en Europe l'économie informelle ! En Europe, si on a des poires dans son jardin, on ne peut pas les vendre dans la rue...), des choses à faire et à inventer... Et il y a chez les argentins un savoir-vivre, un grain de folie (ou de sagesse ?) et une passion attachantes qui rendent les relations et la vie plus intenses et plus vraies.